Il n’aura pas échappé à un lecteur de Derrida
que mon titre reprend, pour le modifier, celui du premier chapitre de De la
grammatologie, « La fin du livre et le commencement de l’écriture », qui
fut publié en 1967. Trente ans plus tard, en 1997, Derrida rédige
une introduction à une discussion avec Roger Chartier et Bernard Stiegler,
qui eut lieu à la Bibliothèque nationale de France. Elle est intitulée
« Le livre à venir », en hommage, entre autres, à Maurice Blanchot. Dans
ces deux textes, il est question du livre, mais pas exactement du même : il
suffit en effet de lire la première phrase de chacun d’eux, pour se rendre immédiatement
compte que les instruments conceptuels au moyen desquels Derrida le ou les
pense ont radicalement changé. Or ceci ne tient pas seulement à la transformation
de la pensée derridienne qui en trente ans serait enfin advenue à maturité, en se libérant
notamment du style encore un peu académique, en tout cas largement pris dans
les schèmes intellectuels des années 60, de De la grammatologie, mais
aussi sans doute, au brutal changement de rythme que connaît le monde à la fin
du XXème siècle. Le style de Derrida (quand je parle de style, j’en
parle dans le sens le plus commun qui soit), c’est tout du moins mon hypothèse,
accompagne une mutation présentée à la fois comme un temps de suspens,
« le temps et la place d’une minuscule virgule dans un texte infini »
(p. 31 PM), et un temps vertigineusement accéléré : « nous
pourrions parler d’une secondarisation de la seconde même (…) ce qui change
ainsi la face de tout sur la face du monde n’est qu’une petite fraction de
fraction de seconde… » (ibid.). Le livre, ou plus exactement le
problème livre, incarnerait donc ce brusque changement de rythme ou cette
brusque suspension du temps, autour desquels tournent sans doute tout « Le
livre à venir ». Qu’est-il donc arrivé au livre en trente ans ? C’est en
commençant par faire une lecture croisée de De la grammatologie et du
premier texte de Papier Machine, que je tenterai de formuler une réponse
et de repenser ce que j’ai appelé, en parodiant le titre du premier chapitre de
De la grammatologie, « la fin et le commencement du livre ».
Je ne crois pas me tromper en affirmant que De
la grammatologie obéit encore à un paradigme structuraliste, même si
Derrida cherche à se départir du structuralisme, notamment saussurien, en en pensant
justement la « fin » qu’il désigne parfois par telle
périphrase : « la clôture d’une époque ». Le diagnostic
derridien formulé dès l’ouverture du chapitre 1 est sans appel : « [L’]
inflation du signe « langage » est l’inflation du signe lui-même,
l’inflation absolue, l’inflation elle-même. Pourtant, par une face ou une ombre
d’elle-même, elle fait encore signe : cette crise est aussi un symptôme.
Elle indique comme malgré elle qu’une époque
historico-métaphysique doit déterminer enfin comme langage la totalité de son
horizon problématique. » Cette époque dont nous parle Derrida en reprenant
le terme de Heidegger, est celle de la présence ou de la conscience qui se
confond enfin, en ce début de deuxième moitié du 20ème siècle, avec
le signifié. L’inflation du signe et la mise en crise du signifié révèleraient
l’impossibilité d’une présence pleine qui n’existe que par et dans le langage. En
effet, si la conscience se confond avec le langage, cela signifie qu’elle est
continument travaillée par la matérialité d’un signifiant qui peut-être se
laisse oublier ou qui peut-être se voit réprimé mais qui secrètement la
structure tout entière. La mise en crise de l’époque du signifié correspond au
retour du refoulé : la matérialité du signifiant ressurgit, mettant en
question l’idéalité et l’identité de la conscience au profit du jeu de la
différence entre les signifiants. Telle est l’époque historico-métaphysique au
sein de laquelle naît la philosophie derridienne et dont elle cherche à se
départir. Car ce que Derrida appelle « l’écriture » n’est justement pas
le jeu des signifiants, elle est cet espacement entre les signes qui ouvre le
signe sur son au-delà. Elle est une dynamique sans commencement ni fin, qui en
appelle à un substitut matériel ou à un support technique dont la forme et la
matière dépendent toujours du contexte historique. Si Derrida parle de
« commencement de l’écriture », c’est uniquement en ce que cette
écriture, qu’il nomme aussi différance, en se délivrant enfin de la répression exercée
par la conscience ou le signifié, peut commencer à se laisser penser. Avec la
prolifération du signe, c’est le signe lui-même qui finit par s’exténuer. Le
texte est en fait cette écriture infinie qui ne se laisse border par aucune
limite et ne se laisse contenir dans aucun livre qui n’est pas simplement identifiable
au livre papier. Dans De la grammatologie, le livre est en effet d’abord
compris comme la totalité du signifiant qui est encore, malgré lui, dépendant
du signifié. Dans les termes mêmes de Derrida, « L’idée du livre, qui
renvoie toujours à une totalité naturelle, est profondément étrangère au sens
de l’écriture. Elle est la protection encyclopédique de la théologie et du
logocentrisme contre la disruption de l’écriture, contre son énergie aphoristique
et (…) contre la différence en général. Si nous distinguons le texte du livre,
nous dirons que la destruction du livre, telle qu’elle s’annonce aujourd’hui
dans tous les domaines, dénude la surface du texte. Cette violence nécessaire
répond à une violence qui ne fut pas moins nécessaire. » (p. 30-31). Dans
cette citation, Derrida glisse d’une définition du livre à une autre : le
livre comme ultime figure onto-théologique devient le livre que l’on tient dans
les mains, que l’on feuillète, que l’on parcourt debout, assis, accroupi ou
couché d’un œil distrait ou attentif, le livre que l’on dépose dans une
bibliothèque et qui forme un tout sur lequel on peut gloser pendant des heures
pour peu qu’on l’ait lu ou fait semblant de le lire. Ces livres-là, nous dit
Derrida dans De la grammatologie, s’essoufflent, ils sont en fin de
course, obsolètes, dépassés, sans avenir. Le temps du livre, qui est le temps
de la patience, le temps du calcul et de la présence se trouve disloqué par la
violence de l’écriture dont la temporalité est discontinue et dont le passé,
inconnaissable, est en fait toujours à venir.
Dans Papier Machine, l’à venir du livre
s’écrit cette fois en quatre mots. Il n’est plus simplement le livre total dont
le livre papier ne serait qu’un avatar, il est un livre qui résulte de l’« incorporation
électronique et virtualisante » (p. 20) du livre papier qui n’a donc
jamais été incompatible avec ce que Derrida appelle le texte, comme une lecture
rapide de De la grammatologie aurait pu le laisser croire. Qu’est-il
arrivé au livre en 30 ans ?, me demandais-je tout à l’heure. Derrida nous
a donné la réponse : il a été incorporé par les nouvelles technologies. Au
livre imprimé sur le papier ou l’écorce s’est substitué, en moins d’une
fraction de seconde, le livre électronique ; et au paradigme
structuraliste qui servait encore à penser le livre dans De la grammatologie
s’est substitué un style singulier, extrêmement fluide qui emprunte largement
au vocabulaire des nouvelles technologies, même si celui-ci reste néanmoins marqué
par celui de la linguistique. En 30 ans, une histoire de plusieurs millions
d’années « qui [a] transform[é], et de façon progressive et
par mutations brusques, le rapport du vivant à soi et à son milieu… »
et auquel on a cru pendant très longtemps, a été brutalement interrompue, mise
en suspens par une « minuscule virgule » (p. 30) ; ce qui nous a
juste donné le temps de nous apercevoir que le texte était infini et que
l’histoire ne s’était en fait jamais laisser tenir en main. Ce temps de
suspens, cette ponctuation n’est donc pas le temps nécessaire à la reprise du
souffle d’une histoire linéaire, elle est plus exactement la brisure d’une
temporalité qui n’est pas simplement disloquée mais dont le rythme s’est
vertigineusement accéléré. Il ne s’agit pas simplement d’une époque de retrait,
comme aurait pu le dire Heidegger, mais on assiste aussi au surgissement d’un
autre temps, ou peut-être, aussi, au surgissement du temps de l’autre, qui brusquement
a fait sauter la répression qui s’est longtemps exercée contre lui. Ce temps
est celui d’une profonde, radicale et ultra rapide mutation qui ne se fonde sur
« aucun modèle et aucune norme à reproduire » (p. 31) et qui reste
donc incalculable. Ce temps-événement est aussi, disais-je, celui de la
prolifération tout azimut des nouvelles technologies qui ont littéralement
« incorporé » le livre.
« Le livre a été incorporé par les
nouvelles technologies ». Voilà une bien curieuse expression que Derrida
entend dans son sens le plus littéral et qui donne du corps, de la vie et du
souffle à ce qu’on pense n’être même pas mort, à savoir le livre ou la machine :
« cela respire ou vit comme le souffle d’une infime et presque invisible
ponctuation » (p. 30). Derrida nous décrit l’apparition d’un monstre ou
d’un mutant ni tout à fait humain ni tout à fait animal ni tout à fait machine,
et cet hybride pourrait bien être le livre à venir qui ne formerait plus cette
totalité que l’on dépose dans une bibliothèque, mais qui se confondrait avec
des processus textuels infinis et ouverts à tous, qui quant à eux modifieraient
« le rapport du visage, des yeux, de la bouche, du cerveau au reste du
corps, à la station debout, à la main, au temps, à la vitesse, etc. » (p.
31). Ce livre étrange qui s’annonce aujourd’hui même, que l’on peut penser mais
non se représenter de manière déterminée, nous travaille sans cesse et nous
transforme à notre insu.
Mais plus précisément, ce qui est peut-être en
jeu dans ce court texte de Papier de Machine, c’est la question de la
mémoire qui est inséparable de la matière, comme nous l’indique le titre de la
première partie du livre, « Matière et mémoire », que Derrida avoue
un peu loin, dans le deuxième texte de Papier Machine, « Le ruban
de la machine à écrire », avoir
volé à Bergson et à Ponge (p. 39). Car derrière ce rêve du livre à venir, se
dissimule en fait toute la philosophie derridienne de la survie, dont nous
allons voir qu’elle est une autre forme d’écriture et dont la temporalité, qui
échappe au présent, est simultanément passée et à venir. Selon Derrida, la
survie, qui excède le vivant aujourd’hui physiquement ou biologiquement présent,
est inséparable d’un substitut matériel qui seul peut se transmettre de
génération en génération. Ni réductible à du biologique ni réductible à du
spirituel, la survie est d’abord le lien entre les vivants d’hier, aujourd’hui
physiquement disparus, et ceux de demain, aujourd’hui non encore apparus. La
survie est donc bien une mémoire qui résiste à son anéantissement, c’est-à-dire
à l’irreprésentable ou à l’effacement irréversible, en produisant et en se
préservant dans des représentations dont la « représentation
consciente » (Vorstellung en terme husserlien) n’est que le dernier
avatar. C’est bien le concept de phainesthai qui est ici, comme souvent,
en jeu. La survie est une machine à produire des représentations qui sont
d’abord des représentations phantasmatiques ou, dans les termes du « Livre
à venir », « des figures marines, abyssales, fantomales, numériques ou
numérologiques » (p. 21). La survie est une représentation matérielle qui
peut bien prendre une infinité de formes en fonction du contexte dans lequel
elle s’inscrit, mais qui garde chaque fois la trace d’une disparition. Elle est
arbitraire et conventionnelle, même si elle est absolument nécessaire. Elle se
détache de son géniteur dont on a depuis longtemps perdu la trace, et se répète
en se déformant au gré de chaque singularité. L’histoire du livre se confond en
fait avec l’histoire de cette représentation ou de cette mémoire. Le livre
garde en lui la marque d’une lutte : si la chaîne signifiante est infinie
(« il n’y a pas de hors texte »), le livre se referme illusoirement
sur un sens. Ce dernier geste est celui d’une conscience qui résiste au
débordement propre à la survie. La survie en effet ne cesse d’excéder le
présent, pour se perpétuer mécaniquement, en suivant la dynamique d’une
itération qui prend corps dans une représentation fantasmatique pas toujours
visible, et dont le phénomène, comme nous l’avons déjà vu, n’est que la forme
idéale. En encore d’autres termes, la sur-vie se confond avec ce substitut
technique transmissible de génération en génération par le biais de la
répétition et qui garde en vie les morts. Le vivant d’aujourd’hui, en
incorporant ce substitut et en lui donnant une autre forme – celle de sa
singularité – permet à la tradition de se préserver et de se perpétuer. Ce
peut-être une citation, ce peut être un mot, ce peut être une image, ce peut
être n’importe quel objet qui est toujours susceptible de devenir un fétiche.
En incorporant ce substitut technique, le vivant d’aujourd’hui se laisse
affecter par une altérité qui survit machinalement en celui-ci. C’est bel et
bien de télécommunication que nous parle Derrida, très longtemps après l’Introduction
à l’origine de la géométrie (1962) dans laquelle ce concept fut thématisé
par le biais de sa réflexion autour du concept d’écriture dont on comprend
maintenant comment elle a pu disloquer le livre papier, pour produire cet autre
livre, monstrueux, fantasmatique et encore à venir.
Le livre suscite donc logiquement toutes sortes
de fantasmes et plus particulièrement deux, nous dit Derrida à la fin du
« Livre à venir ». Ces deux fantasmes ignorent tout, sans doute, de
ce qui vient, mais ils expriment comme des symptômes notre incapacité à prévoir
ou à calculer l’à venir. « Ce qui s’annonce comme la forme même de
l’à-venir du livre, encore comme livre, c’est d’une part, au-delà de la
clôture du livre, la disruption, la dislocation, la disjonction, la dissémination
sans rassemblement possible, la dispersion irréversible de ce codex total (…)
mais simultanément le réinvestissement constant du projet livresque, du livre
du monde ou du livre mondial, du livre absolu (…), le nouvel espace de
l’écriture et de la lecture de l’écriture électronique voyageant à toute allure
d’un point du monde à l’autre, et reliant, par-delà les frontières et les
droits, non seulement les citoyens du monde sur le réseau universel d’une universitas
potentielle, d’une encyclopédie mobile et transparente, mais surtout lecteur
comme écrivain possible ou virtuel, etc. » (p. 27). Autrement dit, les
« deux limites fantasmatiques » du livre à venir sont « la fin
comme mort ou la fin comme telos ou accomplissement » ; je
cite une fois de plus Derrida. Ces deux fantasmes s’inscrivent donc encore dans
une représentation téléologique ou messianique, en un mot judéo-chrétienne, de
l’histoire – l’apocalypse n’étant en effet que l’envers de l’arrivée du Messie
– que le livre à venir ne cesse pourtant de disloquer. Contrairement à ce que l’on
fait parfois dire à la philosophie derridienne, on voit donc bien ici que celle-ci
n’est pas gouvernée par la nostalgie du telos ; et que ce que
Derrida appelle parfois le « messianicisme sans messie » est
justement une perversion du vocabulaire de la philosophie messianique ou
téléologique.
Comment dès lors parler justement du livre à
venir, sans se laisser porter, comme tout à l’heure, par la dynamique de la
survie qui le sous-tend ? Peut-être en se mettant à distance de ces deux
fantasmes, même si l’on doit aussi les garder en mémoire. Il faut d’abord se
délivrer de l’idée selon laquelle le livre pourrait corps et bien disparaître,
et plutôt analyser ses formes de résistance à l’intérieur même des nouvelles technologies.
Mais il faut tout autant se délivrer de l’idée selon laquelle il serait
possible de reconstruire le livre du monde, qui contiendrait tous les savoirs
en se débarrassant du livre ancien, du livre papier beaucoup trop rigide et beaucoup
trop opaque par comparaison avec la fluidité et la transparence du numérique,
seul capable de reconstruire une nouvelle Aufklärung. Car dans ces deux
cas, il s’agit de dépasser le livre, plus exactement la matière « livre »,
soit en l’annihilant soit en l’idéalisant. Ce sont là les deux modalités d’un
même rêve d’immortalité bien éloigné de la dynamique d’une survie qui ne cesse
de se transformer en s’incorporant dans des singularités vouées à disparaître.
Si un tel rêve se débarrasse d’une matière trop encombrante, la survie y est
inscrite ; elle en est inséparable, même si elle n’y est pas réductible.
Une matière habitée par une vie qui excède le présent, voici comment pourrait in fine se définir la survie.
Dans cette perspective, il est donc bien
possible d’envisager la fétichisation du livre qui, à venir, est en fait
toujours passé. Si le livre peut être érigé en fétiche, c’est-à-dire en un
matériau vivant, sacré mais aussi en lequel on a foi, c’est parce qu’il
garantit la survie de singularités aujourd’hui disparues, mais qui se destinent
à l’à venir. La magie propre au livre est ainsi destinée à demeurer, exerçant
toujours la même fascination et suscitant toujours le même amour chez ceux qui
auront su le lire, c’est-à-dire qui auront su se laisser hanter par le survivant
qui y est dissimulé pour lui redonner, l’espace-temps d’un instant, une autre forme
de vie, étrange et inquiétante (Unheimlich
en termes freudiens).
Enfin, cette mutation du livre qui flirte avec
sa disparition, ouvre de nouvelles zones éthico-politiques qu’il faudra bien
que le droit investisse par un moyen ou par un autre. Il en va de la question
du droit d’auteur, qui occupe la réflexion de Derrida depuis « Signature
événement contexte », mais aussi, très certainement, de celle du pouvoir
et du savoir, qui n’était pas absente lors de la domination du livre papier et
qui reste active, après l’incorporation de ce dernier par les nouvelles
technologies. Cette idée d’une ouverture de zones de non droit attendant leur
régulation par un droit qui se devra d’être le plus juste possible, se trouve
déjà dans Force de loi, et elle est inséparable de la politique et de
l’éthique de l’altérité développée par Derrida. C’est au nom de la
quasi-transcendance de l’autre qui est virtuel mais dont la survie est bien
réelle, incorporée dans un substitut technique, que la justice doit se rendre.
L’éthique et la politique derridiennes se pensent toujours en raison de cette
altérité que l’on peut dénier ou à laquelle on peut au contraire redonner un
espace et un temps out of joint, pour reprendre cette citation de Hamlet,
qui structure les Spectres de Marx et qui est aussi en travail dans le « Livre
à venir ».
Quoi qu’il en soit, si ce livre à venir devient
aujourd’hui pensable, même si non représentable, c’est sans doute parce que,
comme je le remarquais en ouverture de mon intervention, le rythme de
l’histoire s’est brusquement accélérée sous la puissance des nouvelles
technologies ou la force d’une survie qui a fait éclater ce que j’appellerais,
pour respecter la dynamique de la philosophie derridienne, « le corps de
l’histoire ». Organisée autour de la tête, du visage, des yeux et de la
bouche, cette histoire qui ne se
différencie pas du logos tel que le
rêvait Platon, pouvait, illusoirement, se tenir en main, se maîtriser dans sa
totalité et se laisser enfermer dans un livre relié. Mais cette autre histoire,
écrit Derrida, « ne tient pas à elle-même, ne se maintient pas, ne se
tient plus en main maintenant. Elle n’obéit plus au doigt et à l’œil comme
ferait un livre. L’aurait-elle jamais fait ? » (p. 31). « Le
livre à venir », je parle du titre comme de l’objet, se referme donc sur
un futur antérieur dont nous savons quelle place il tient chez Derrida. Car c’est
toujours au sein des bibliothèques, où se dépose le passé, que se cache l’à
venir.
Elise
Lamy-Rested
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