« Tout labyrinthe est fait
pour qu’on s’y perde et, pour cela, il comporte des voies sans issues, des
impasses, des chemins qui reviennent au point de départ (…). En ce sens, tout
labyrinthe est une énigme, une devinette, un jeu auquel il ne faut pas jouer,
mais qu’il faut déjouer. Car tout l’art consiste, non à trouver la juste
réponse à la question posée (…), ni même la bonne solution au problème
rencontré, mais précisément l’issue,
la sortie : Comment se sortir de
la situation dans laquelle on est pris ? Comment trouver la bonne
issue ? Y aurait-il une impasse que l’on pourrait détourner en un
passage ? »
(Françoise Proust, L’histoire à contretemps)
Prologue : Une scène axiale
Au commencement, tout est silencieux. De
temps à autre, on entend le bruit répétitif des insectes. Alternance monotone
des jours et des nuits. Coexistence pacifique des espèces. Rien ne se passe,
semble-t-il. Même lorsque de grands primates se querellent à propos de
l’appropriation d’une étendue d’eau, ils ne font que gesticuler, ils singent la
violence, de loin, mais ne s’affrontent pas.
Un jour, à l’aube, on ne sait quand à
proprement parler, se dresse un monolithe noir, structure d’une géométrie aussi
parfaite que celle du soleil, ou d’une station orbitale. Il est effroyable ;
un primate, puis plusieurs le touchent malgré tout – plan rapproché : les
voici tous au contact, sur fond du Requiem de Ligeti.
Plus tard, un primate tient un os à la main.
On comprend - qu’il est sur le point de comprendre, et qu’il anticipe : des
images de bêtes frappées à mort, voilà ce qu’il projette de faire avec un os,
il se voit déjà chasseur. Il passe de l’autre côté, sur le versant des êtres
humains, avec en fond Ainsi parlait Zarathoustra de Richard Strauss. Il devient humain.
« Il » ?
– qui donc, « il » ? Un primate ? Ou déjà quelque
pré-humain ? Quelque chaînon manquant entre les deux ? Il se passe
quelque chose, mais où, quand, et pour qui, à qui arrive-t-il quelque
chose ? On voit, on anticipe, on imagine que ça se passe, entre cet
être en devenir, son arme-outil et la musique de Strauss. Quel agencement
improbable…
Ils sont debout désormais, devant la même
étendue d’eau, mais c’en est fini du statu quo. Certains n’ont pas eu la chance, ou plutôt le privilège de toucher le
monolithe et d’être contactés par l’ordre symphonique ; ils n’auront pas su
accéder aux armes comme à la suprême dignité de la bipédie. Un meurtre, la technique,
une technique de mort fait se lever l’humanité dans le sang, le pouvoir et
l’appropriation des territoires. Mais l’humanité s’élève coupée en deux. D’un
côté les vaincus, des esclaves bientôt ; de l’autre les maîtres ;
entre les deux l’objet du désir, cette eau aussi fluide qu’est solide le
monolithe.
Elévation et
différence, humains et bêtes, monolithe et flux, phallus
et féminité, tous ces dispositifs conceptuels vont se répéter, se vérifier, se
renforcer au fur et à mesure de l’histoire humaine. Juste après le premier
homicide, le premier assassin admis au rang d’être humain lance son arme vers
le ciel ; elle se transforme en station orbitale. Voici venu le temps de
l’intelligence artificielle, HAL, cet autre meurtrier. Son humanité apparaîtra
de façon régressive, lorsque sa mémoire vidée laissera revenir une berceuse
qu’il avait apprise aux premiers temps de sa programmation. L’histoire humaine
se fait posthumaine et prépare son retour.
Plus tard,
bien plus tard : après s’être élevée, pour finir et recommencer,
l’humanité s’enroule dans un fœtus-monde dépouillé de tout élément machinique.
L’énigme - l’éternel retour – un devenir postmachinique - ainsi parle
Zarathoustra ...........
***
Mon étude tend à s’inscrire dans ce prologue,
ce récit porté aux avances d’une enquête en travelings avant et arrière sur la scène axiale de 2001, l’Odyssée de
l’espace, le film littéralement
fabuleux de Stanley Kubrick. Car c’est bien dans un pro-logos que se situe l’axe du film : avant que ça ne parle.
Mais les signifiants purs du mythe cinématographique, des musiques qui
l’accompagnent et de la technologie qu’il érige, nous invitent à les remplir de
sens. Disant, analysant, je déplacerai ce silence, sans jamais le taire
définitivement, le portant malgré moi peut-être au compte du mythe, du chant de
l’enfance de l’humanité, et du style d’une analyse.
Il est cependant diverses manières de se
déplacer. La mienne vaudrait pour test de l’axe monolithique qui le leste. Un
traveling en zigzags doit rendre compte de généalogies non linéaires, des
impasses conceptuelles, des reprises et des répétitions qui scandent les
rapports que les êtres humains entretiennent avec eux-mêmes, au sujet de ce
qu’ils sont et de ce qu’ils font. Il ne peut être question d’être humain sans
énigme. Celle-ci n’est pas de l’ordre d’un mystère empêchant la réflexion, ou
quelque « asile de l’ignorance » (Spinoza), elle est le nom d’une
interrogation qui ne peut être que relancée face à l’existence improbable du
monde, des êtres humains, des êtres vivants. En s’inclinant plusieurs fois et
dans toutes les directions, l’axe monolithique doit se faire labyrinthe. Voici
que s’avance Homo labyrinthus. Ni sapiens, ni faber, ou pas
seulement, pas exactement. Ce labyrinthe est sombre, plus noir parfois que le
monolithe de 2001, et porteur aussi
bien de nuances dans les tons obscurs. Perdant de sa simplicité, la scène
initiale pourrait dès lors se transformer, et laisser place à de nouveaux
personnages, des figurants - des
compagnons, des doubles, des revenants. Des morts ou des vivants ; des
animaux ou des médiations technologiques ; ou les deux, tout à la fois. Tout
un monde. Qui nous obligera à reconsidérer les rapports des êtres humains aux
animaux et des animaux aux médiations technologiques et langagières – ces existences singulières. S’il ne veut pas
récidiver indéfiniment, tuer en lui la part vivante, l’être humain d’après
l’humanisme devra être à l’écoute du singe Washoe, qui pouvait combiner jusqu’à
cinq signes issus de l’American Sign Language, de l’ancêtre
Tumaï, vieux de 7 millions d’années, et du Réplicant amoureux et mortel de Blade Runner, le long-métrage de Ridley Scott.
D’où venons-nous, la question de l’enfant, pourrait changer de sens. Hors tout
principe d’évolution linéaire, l’humanité a survécu à grand-peine, et sa survie
est aujourd’hui menacée, comme celle d’autres espèces, par ce que certains
nomment désormais la Sixième Extinction. Plus que jamais, l’humanité fragilisée
porte avec elle la contingence du monde.
De il
- qui est-il, l’être humain ? -
nous passons au nous, cette étrange
coalition d’êtres plus ou moins biologiques, plus ou moins technologiques. Ce
passage du il au nous, ce changement de sujet est l’objectif de mon étude.
J’aimerais voir se transformer la scène axiale du film de Kubrick. Or une telle
transformation implique de subvertir les fondements refoulés de l’humanisme
dont elle est chargée. Un humanisme intégral hante les posthumanismes et les
transhumanismes, insiste lourdement derrière le masque des cyborgs, et donne la
raison d’être des thèses dites « accélérationnistes » qui aujourd’hui
séduisent les intelligences pressées par une pulsion moderne toujours
hégémonique. Cet humanisme empêche de penser la coalition originelle que
la scène axiale de 2001 ne présente
qu’à moitié, et défigure,
- d’une part en mêlant indistinctement la technologie et le divin,
-d’autre part en privilégiant toujours la part de l’être issue de cette fusion sur
le reste du monde.
A la fois contre ce mélange spiritualiste et contre ce privilège humaniste, c’est-à-dire contre les hybridations fades et les exceptions
trop humaines, je revendique la nécessité d’un nouvel antihumanisme,
attentif à la contingence (ontologique), à la précarité (existentielle) comme à
la fragilité (écopolitique) du monde de la vie. Un antihumanisme stratégique, vecteur
d’une politique des existences :
comme un cheval de Troie théorique qui s’ajouterait à la scène axiale de 2001 pour en changer l’orientation, le
script, et la musique. Comme une caméra supplémentaire, qui filmerait le film
de l’intérieur, et le détournerait de son axe. Entrons dans le labyrinthe.
Frédéric Neyrat, extrait de Homo Labyrinthus
Essayer d arginer,fréner, enfin,de lutter pour ré/donner des alternatives d autres situations à vivre sur la terre!en symbiose avec notre " monde animale végétal!!combattre,l idéologie dominante ,à venir" ou"à"" devenir,...du trans humanisme""""!construire en déconstruisant cette'folle', pensée -idéologie dominante" anarko" neo" kapitaliste du renard,du loup, dans le poulliaier!,"(trans humaniste inégalitaire fausse liberté ,étc)....à venir:"!!!!!"Ré/construire"", des," contre-pouvoirs,""avec une autre" boîte à outils,"trans modrerniste,"car mon post modem est loin actuellement!écouter les suggéstions, les", Deleuze- Guattari," des contre-pouvoirs ,"dans les interstices de la societé -pensée- unique,"- dominante!;une autre ré/ volution moléculaire à venir pour des masses critiques!??ok§§D accord !!car les animaux 'dits," humains":ce sont les prédateurs,les plus féroces, de la planète:!!!!!sympa votre extrait livre,une ,"goutte ,"en plus,de la philo" féroce," alter mondialiste ,alternative(underground overground theory),en lutte contre le cannibalisme transhumaniste "et cie!" !!un sympa livre,je crois,pour les prochaines générations (en construction, de" situations)pour arreter la folie de cette élite dominante(pensée theorie et puis praxis ),,du big brother orwellien huxleyen,"(societé du spectacle integré! agambien debordien concepteurs ,"passeurs,"de la"" french italian theory""-,"vague du critical creative thinging'') )combattre, donc,enfin, leur idéologie,"(c est à dire : de cette élite globaliséeneo capitaliste",(google fb du néo' pouvoir financier boursier virtuel techno),"qui a volé leur avenir ,( des jeunes ))en détruisant l humain,vivant et toute," harmonie,...les " interactions,"... naturelles,"des mondes sensibles vitaux," :de l animal végétal", de la terre gaia: notre mère à tous!pardon pour votre belle langue blessée mais je suis un étranger d ailleurs !!!!alien cyberdada salut les terriens!!Spock!! bon courage!ok!bonne continuation!!j aime la néo pop philo "post" french theory"de la belle époque francaise et italienne!et voilà!bye bye ciao NEO de matrix???à suivre;;;sympa!!j aime....des affinitées éléctives"(du Goethe peut etre ?)
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