La qualité
d’une postface se mesure le plus souvent à sa capacité à épouser à la fois deux
mouvements bien distincts mais réconciliables : en même temps qu’elle doit
éviter de trahir le propos de l’auteur pour ne pas verser dans la ventriloquie
idéologique, elle doit jeter un nouvel éclairage sur son œuvre et permettre de
la redécouvrir sous un angle fertile. Cette capacité se révèle de façon manifeste
dans la postface de Tristan Garcia à Algèbre
de la tragédie, « Critique et rémission ». Serrant de près les
dix premières pages du génial ouvrage de Mehdi Belhaj Kacem, le texte de
Tristan Garcia porte au jour certaines des plus fécondes potentialités
contenues – tantôt implicitement, tantôt explicitement – dans l’œuvre de
l’écrivain-philosophe, et prolonge ces potentialités par un développement personnel
qui fait écho à Forme et objet. Un traité
des choses. Parce que l’essai de M. B. Kacem a déjà fait l’objet de
certains commentaires et entretiens, dont un fut publié sur le présent blogue,
j’aimerais centrer ici mon analyse sur la postface elle-même dans l’intention
d’expliquer pourquoi, articulée à d’autres idées disséminées dans l’œuvre de
Garcia, elle mérite d’être lue comme une contribution de premier plan au
problème de l’épuisement de la modernité, de la postmodernité et de la pensée
réactionnaire.
« [P]etit
frère de théorie […] qui partage un héritage avec [Algèbre de la tragédie], pren[d] exemple sur lui mais choisi[t] un
autre chemin de pensée et de vie » (p. 247), la postface de Tristan Garcia
met en relief deux idées directrices et complémentaires présentes dans
l’ouvrage de M. B. Kacem. D’une part, à travers le concept de
« fatigue du négatif » (p. 262), elle fait comprendre que la
modernité s’engage dans une voie aporétique lorsqu’elle appelle de ses vœux le
dépassement incessant des règles. À demander à tous et chacun de créer, désobéir,
trahir de façon originale le passé et le présent, la modernité nous place
devant un étrange dilemme : ou bien nous obéissons à l’impératif de
désobéissance et devenons conformistes, réussissant et ratant en même temps et
sous le même rapport ; ou bien nous désobéissons à cet impératif, nous
cessons d’innover et devenons réactionnaires. D’autre part, toujours à partir d’une
analyse de l’esprit moderne, Tristan Garcia révèle l’une des conséquences les
plus marquantes du processus de singularisation. De la même manière qu’Adorno
disait de l’art qu’il risque de n’être plus rien à force d’être tout et
n’importe quoi, la singularité moderne paraît susceptible de perdre son
identité propre à force de se répandre dans tous les champs de l’expérience ;
car si toute personne aspire à être singulière et que « l’exception
devient la règle » (p. 265), la singularité se voit amputer de la
différence dont elle dépend pour être ce qu’elle est et s’affaisse du même coup
– elle « ne s’annihile pas, elle s’épuise. » (p. 268) Une fatigue
historique se fait dès lors sentir qui emporte sur son passage non seulement
l’exigence de renouvellement incessant, mais encore le concept même de
singularité.
Deux
solutions possibles : la critique et la rémission
La postface
de Tristan Garcia est l’occasion de tirer au clair deux solutions possibles à
ce problème moderne. La première, il la perçoit dans l’œuvre de Mehdi Belhaj
Kacem : c’est celle qui consiste à cibler une nouvelle différence
fondamentale, le Mal et la Tragédie (p. 270), à négocier avec cette différence
et à redonner ainsi aux singularités une altérité à laquelle s’opposer. Cette
réponse « projette de maintenir la critique [moderne] contre la critique »
(p. 249), parce qu’au lieu de renoncer à faire front au monde, elle implique
d’affronter ses aspects pernicieux. La seconde solution remédie autrement au
problème de la « perte d’intensité » (p. 270) qu’engendre l’évidement
de la singularité moderne. Elle correspond à l’alternative qu’adopte et
défend l’auteur de la postface. Pour l’essentiel, elle consiste à rechercher
une issue à l’épuisement de l’esprit en traversant à la hâte la modernité
elle-même. Ici, « la pensée se fixe pour but de désintensifier la crise,
d’affaiblir la résistance de l’Esprit lui-même, de cesser de s’opposer quoi que
ce soit, pour au contraire hâter le nihilisme jusqu’à son terme – dans l’espoir
qu’il en ait un – et de passer à autre
chose. » (p. 273) Plutôt que d’identifier une nouvelle forme de Mal et
de critiquer de l’intérieur l’esprit de la modernité, qui pâtit sans cesse
davantage de sa quête de singularité, Tristan Garcia tente en effet de pousser
cet esprit jusque dans ses derniers retranchements pour faire apparaître une
zone de rémission. Pourquoi privilégier cette option ? Et comment la mettre en
place afin de répondre à la dépression vers laquelle nous pousse la modernité ?
On pourrait
résumer le fil conducteur du projet de Garcia par une question laconique :
comment penser rigoureusement sans être ni un « moderne à
l’ancienne », ni un postmoderne qui dissout le réel en un flux évènementiel,
ni un réactionnaire qui se vante d’innover en cessant d’innover [1] ? Ni
un moderne à l’ancienne, parce qu’il développe une pensée rémissive qui va au-delà
de la critique, de l’acte de juger l’esprit occidental « depuis une autre
culture » (p. 253) et du refus d’employer le langage chosal pour
caractériser le monde ; ni un postmoderne, parce qu’il tient compte à la fois
du devenir intensif et de son extériorité au lieu de faire des choses une sorte
de « construction » ou de « projection volatile » [2]
; ni un réactionnaire, parce que le retour en arrière n’est pas pour lui une
fin en soi et qu’il ne renoue pas avec la « substantialité qui tend à
compacter l’être » [3], Tristan Garcia veut se tenir « à égale distance »
entre ces trois postures. Philosophe de l’extrême centre, au sens non pas
politique mais ontologique du terme, il se fait le partisan d’une vaste
réconciliation de l’histoire avec elle-même ainsi que d’une traversée
progressive de cette histoire et tout particulièrement de sa phase moderne. Sa
position se justifie en ces termes : « Disposant de la platitude
ontologique non pas comme d’un fond ou d’un fondement ontologique mais comme
d’une ligne de jauge, d’une égalité
qui lui permet de défaire tout relativisme, tout perspectivisme, tout
libéralisme, en se représentant leur inconséquence au regard d’une véritable
platitude, l’esprit est délivré des sortilèges de la singularité immédiatement
commune, de la différence immédiatement identique, et des “tout se vaut”
vulgaires : il a affronté la platitude où le général n’est pas moins (mais
pas plus) que le singulier, où l’inexistant n’existe pas moins que l’existant,
où le contradictoire est autant que le possible, où la partie vaut très
exactement le tout (mais où le tout vaut aussi la partie), où chaque occurrence
de n’importe quelle entité est égale à cette entité, où le faux compte, et le
vrai aussi. » (p. 297-298)
C’est qu’il
s’agit toujours chez Tristan Garcia de traverser des moments, des options, des
positions afin d’enrichir une ontologie qui, loin d’endosser le principe du
rasoir d’Occam, multiplie les entités dans une quête asymptotique du Tout. Cela
explique d’ailleurs que son travail d’écriture l’amène à s’aventurer vers les
objets les plus divers, de la question de l’être humain jusqu’à celle des
séries télévisées, en passant par l’animal, l’exploration spatiale, l’image, le
sport et les « anges déchus » tentés dans leur jeunesse par le
radicalisme politique... Cela explique également qu’il soit question dans sa
postface de critique et de rémission.
De critique, parce qu’il ne fait pas une croix sur la distance qu’il est
possible de prendre vis-à-vis de certaines positions auxquelles on souscrit aujourd’hui
ou souscrivait jadis. Et de rémission, parce qu’il tient compte de chacune de
ces positions sans jeter froidement l’anathème sur elles, évitant ainsi d’attiser
tout ressentiment. La rémission promue par Tristan Garcia constitue en fait un
projet si rédempteur qu’il étreint à la fois la possibilité d’une distance
critique et la possibilité d’aller
au-delà de cette distance : il contient en germe tour à tour le désir
critique et le désir de s’en prendre
au ressentiment qui émane parfois de la critique ; il excuse le jugement et la volonté de dépasser le jugement
(Nietzsche, Deleuze), l’objectif étant d’aller au-delà de la critique moderne sans
culpabiliser pour autant tout esprit critique. Pour témoigner de sa solidarité
à l’égard de celui qui emprunte une voie quelque peu différente de la sienne,
Tristan Garcia va d’ailleurs jusqu’à dire, dans un élan de générosité aussi subtil
que fécond, que la pensée critique de M. B. Kacem recèle elle-même un certain appel
« à la rémission, à l’après » (p. 304) ; de sorte qu’il tend la
main à son vis-à-vis pour le convier à faire un pas supplémentaire dans sa
direction – s’il le veut bien.
Une
invitation est ainsi lancée à qui souhaite le suivre dans son projet rémissif
où toutes les entités du monde seraient réconciliées d’un point de vue
ontologique. Et, en la matière, Forme et
objet demeure à ce jour la meilleure expression de sa volonté rémissive. En
abordant tour à tour les objets dans leur isolement ontologique puis dans leur
rapport les uns par rapport aux autres, Garcia conjugue deux méthodes pour
aller au plus près d’un monde qu’il cherche à envisager de manière exhaustive :
il « dé-détermine » [4] les choses puis les
« re-détermine » – gestes sur lesquels il revient aussi dans
« Critique et rémission » en insistant surtout sur le premier.
D’aucuns lui reprocheront peut-être de vouloir embrasser un si grand nombre de
choses qu’il rend a priori impossible
l’atteinte de son objectif. Mais Tristan Garcia n’est pas dupe. Bien conscient
de l’incapacité de l’esprit humain à viser d’un seul coup la totalité des
choses, il semble suggérer, tout au plus, que la finitude ne doit pas nous
empêcher de reconnaître un égal statut ontologique à toutes choses – que nous
visions ou pas l’ensemble de ces choses dans l’immédiat. Il importe donc moins
à ses yeux pour l’esprit humain de connaître en acte la nature de chacune des
choses de l’Univers, que d’affirmer que chaque chose présente et à venir
possède et possédera un égal droit à l’existence, y compris les contradictions
et les faits négatifs. Car « le quelque
chose […] c’est ce qui, lorsqu’on le nie, est affirmé autant, ni plus ni
moins, que lorsqu’on l’affirme. » (p. 280)
Certains
s’interrogeront peut-être sur les conséquences éthiques d’une telle pensée
irénique. À accorder à tout une égale dignité ontologique, Tristan Garcia
s’engagerait-il, qu’il le sache ou non, qu’il le veuille ou non, sur la pente
de la contemplation éternelle de toute chose et du statu quo ? On serait trop sévère en répondant par l’affirmative.
Car l’ontologie de Tristan Garcia ne prétend pas sonner une énième fin de
l’histoire : voulant en finir avec le thème de la fin tout en prenant en
considération ses diverses manifestations historiques, cette ontologie
rémissive représente une phase dans une vaste entreprise de pensée qui pourra
être prolongée dans l’avenir. Il s’agit donc en quelque sorte d’une étape, mais
non de la moindre des étapes, car elle est censée procurer « adoucissement
et miséricorde » (p. 272) à l’esprit et le libérer peu à peu de sa
fatigue, de son désespoir, de son épuisement à se poser en singularité à côté
d’autres singularités. Cette étape pourrait d’ailleurs à mon avis s’accompagner
de l’effort de surmonter un présupposé, celui selon lequel il est forcément
désolant de découvrir qu’on est une singularité parmi d’autres.
En fait, si
bon nombre de singularités ont tendance à déprimer en rencontrant la multitude croissante
de singularités qui les entourent et font paraître chacune d’elles de plus en
plus commune, c’est en partie parce que certaines d’entre elles préfèreraient, qu’elles l’avouent ou non,
être moins nombreuses voire les seules à briller singulièrement. Gageons
toutefois que cette préférence élitiste et individualiste, renforcée par le
contexte historique, pourrait être remplacée par un sentiment plus constructif,
l’ébahissement. Au lieu de se sentir accablé par le nombre grandissant de
singularités exceptionnelles, pourquoi ne pas reconnaître dans au moins
certaines d’entre elles un digne motif d’étonnement, un moteur de pensée, une
source d’inspiration pour l’action ? N’est-il pas réjouissant que de plus en
plus de singularités excellent et contribuent au devenir de l’univers,
cette « machine à faire des dieux » (Bergson) ? Cette multiplication
permet en tout cas d’atténuer le fossé qu’on aime parfois à voir entre les êtres.
Tristan Garcia ne formule pas au grand jour ce nouveau motif de réjouissance,
parce qu’il met l’accent sur la possibilité d’accélérer la modernité pour la
mener à son point de rupture, mais ce motif pourrait selon moi contribuer à
résorber, au moins temporairement, le sentiment d’épuisement propre à la modernité
en prévision d’un éventuel dépassement. Le diagnostic de Garcia a donc beau
être tout à fait pénétrant, il pourrait sans doute être complété par un travail
de conversion du regard : celui qu’on porte sur la banale exceptionnalité
des autres et de soi-même.
Littérature
et philosophie : l’axe majoritaire/minoritaire est-il pertinent ?
Bien que ce
soit dans sa postface à Algèbre de la
tragédie qu’il formule avec le plus de netteté sa solution au problème
moderne, on voit se dessiner ailleurs dans son œuvre plusieurs réflexions qui vont
en ce sens. En mettant en parallèle certains passages éloquents à ce sujet et
le propos de sa postface, j’aimerais faire ressortir l’existence d’une
oscillation qui m’apparaît féconde et révélatrice entre, d’une part, la volonté
de Tristan Garcia d’aller au-delà du geste critique moderne et, d’autre part,
son souci (encore moderne) d’innover. Loin de chercher à faire éclater au grand
jour une contradiction chez lui, je chercherai ainsi à montrer en quoi
différents travaux de Tristan Garcia anticipent avec cohérence son désir de se
situer à cheval entre la critique et la rémission – la seconde venant
accueillir gentiment la première comme son amie ou sa petite sœur repentante.
Où se révèlent ces anticipations ? En quoi sont-elles fructueuses ? Elles se
font jour notamment à travers un dialogue sur les minorités dans un chapitre magnifique
de La meilleure part des hommes. Pour
y voir plus clair, rappelons d’abord en quelques mots en quoi consiste l’une des
théories contemporaines de la minorité, celle de Deleuze.
Comme il
l’indique dans sa « Lettre-préface à Jean-Clet Martin » [5], et comme
Mehdi Belhaj Kacem le rappelle dans l’incipit d’Algèbre de la tragédie, Deleuze n’est pas du tout allergique à
l’idée de système. Au lieu de mettre au socle de sa pensée l’identité et la
fixité, il y place cependant de nouvelles notions : le devenir, la
multiplicité, la différence, le virtuel. L’une des conséquences éthiques qui en
découlent correspond à sa théorie de la minorité. D’après ce qu’on peut déduire
de Mille Plateaux et de Kafka. Pour une littérature mineure, une
minorité est à définir non pas quantitativement, mais qualitativement,
c’est-à-dire « par le devenir ou la flottaison » [6] qu’elle est en
mesure d’accroître. Est minoritaire une culture opprimée, dévalorisée et
multiple, mais « affectée d’un fort coefficient de déterritorialisation »
[7]. Pour Deleuze, il n’incombe pas à une culture minoritaire de chercher à renverser
l’ordre établi pour remplacer le pouvoir par un autre pouvoir ; il lui faut plutôt
essayer d’embarquer dans un devenir la culture majoritaire pour stimuler le
mouvement vital par un « exercice de minoration » [8]. En
l’occurrence, de deux choses l’une. Ou bien l’on est issu d’un groupe
majoritaire et l’on doit « trouver son propre point de sous-développement,
son propre patois, son tiers monde à soi, son désert à soi » [9] :
c’est ce que fait Deleuze lorsqu’il assèche la langue française. Ou bien l’on
est issu d’un groupe minoritaire dont on doit « pratiqu[er] et lib[érer]
l’expression » par un « discours indirect libre » [10] :
c’est ce que fait Pierre Perrault lorsqu’il donne à entendre dans ses
documentaires la francophonie québécoise, minoritaire en Amérique du Nord.
Au fait de
l’importance qu’a acquise au cours des dernières décennies l’axe majoritaire/minoritaire,
Tristan Garcia associe dans « Critique et rémission » l’esprit
critique au souci de minoration et souligne que le statut (très recherché) de
minorité est susceptible d’être intégré à une stratégie dont peuvent se
réclamer tout autant la gauche que la droite :
Qui se croit
aujourd’hui majoritaire dans son époque par la pensée ? Personne. C’est le
propre de l’esprit critique. Dans son essai, The Blank Slate : The Modern Denial of Modern Nature, Steven
Pinker décrit ainsi son époque comme rétive au concept de Nature, encombrée de préjugés des sciences sociales. Pour livrer
son diagnostic d’antinaturalisme, il remonte à l’empirisme (la tabula rasa en faveur de l’acquis) aussi
bien qu’au romantisme.
Ouvrez en regard un livre de sociologie bourdieusienne : le
diagnostic vous paraîtra bien différent. Dans La Domination masculine, par exemple, est présentée comme
« intellectuellement dominante » la tendance des psychologues à
naturaliser leurs objets.
De même un essai libéral, par exemple l’opuscule de Raymond
Boudon, qui se demande Pourquoi les
intellectuels n’aiment pas le libéralisme ?, commencera
immanquablement par une dénonciation à la manière de Raymond Aron de
« l’opium des intellectuels », donc de l’antilibéralisme des
professionnels de la pensée.
Tout au contraire, dans les essais de Daniel Bensaïd sur Marx l’intempestif ou les « temps
discordants », ce qui est exposé au lecteur, c’est le tableau d’une époque
de soumission de la plupart des intellectuels et de la pensée dominante au
néolibéralisme.
Aussi, un lecteur du Nouvel
Ordre écologique de Luc Ferry verra se dessiner une peinture de son temps
marquée par la convergence de lignes environnementalistes, utilitaristes et
obsédées par la souffrance animale. Alors qu’un lecteur habitué aux ouvrages de
Peter Singer se représentera plutôt un temps présent sous la coupe de préjugés
spécistes et humanistes, aveugles aux intérêts des individus des espèces non
humaines.
Tout diagnostic de la modernité qui précède une critique est donc
stratégique.
Fort logiquement, le critique de l’Esprit doit, pour s’identifier,
diagnostiquer la victoire de son ennemi.
Ouvrant Algèbre de la
Tragédie par un constat d’antihégélianisme, Mehdi Belhaj Kacem n’échappe
pas à la règle et se situe lui-même : il définit ce par rapport à quoi,
dans son temps, il se retrouve en position de minorité stratégique. (p.
257-258)
Ce qui ressort de ces remarques,
c’est que le statut de minorité peut être volontiers employé à des fins
stratégiques, quel que soit le camp politique ou intellectuel auquel on est
associé. Aucun penseur n’a en effet intérêt à être dépeint comme « le
reflet de son époque », « l’esclave de la culture ambiante » ou
une « conséquence immédiate du monde dans lequel il vit ». Personne
ne se présente comme un auteur « bien-pensant » et « politiquement
correct » et, si quelqu’un devait un jour se présenter ainsi, il le ferait
sans doute sous prétexte de renverser une pratique répandue. Soucieux à la fois
de démontrer son originalité et l’intérêt de sa posture dans le contexte
actuel, chaque intellectuel a tendance à suggérer, ou tout au moins à laisser
entendre, qu’il faut faire preuve d’audace pour défendre la cause qu’il défend,
ou bien encore que son « ennemi est […] dominant. » (p. 256) Les
exemples éloquents que donne Tristan Garcia pourraient d’ailleurs être
complétés par de nombreux autres, de toutes allégeances politiques. En
accordant une importance à l’axe majoritaire/minoritaire, Deleuze était bien
sûr d’avis que seules certaines revendications progressistes concordent avec ce
qu’il juge être la véritable minorité (la critique du capitalisme, la mise en
cause de l’appareil d’État, la dénonciation de l’individu souverain...) ; mais les
exemples relevés par Tristan Garcia montrent bien que la gauche n’a pas
l’apanage du discours centré sur la minorité.
Bien qu’il faille rappeler que
l’œuvre littéraire de Garcia n’est pas l’illustration pure et simple de sa
pensée philosophique, ses romans et ses essais ne fonctionnent pas pour autant
en vase clos et certains recoupements occasionnels demeurent possibles entre
eux. Ainsi, dans un passage truculent de La
meilleure part des hommes, roman qui s’intéresse au mouvement homosexuel de
la fin du XXe siècle, l’écrivain met en scène des personnages
qui s’accusent l’un l’autre d’être « majoritaires ». Le premier,
Leibowitz, issu « lointainement » de l’extrême gauche, écrit un
article dans Libération qui
s’intitule « Être de gauche aujourd’hui, c’est rompre avec la gauche et
son esprit majoritaire » [11]. Il manifeste alors son appui à la droite en
arguant qu’il s’agit là d’« un acte de résistance à la rébellion factice »
[12] et que l’hostilité générale qu’il s’attire de la part de la gauche ne fait
que confirmer la position minoritaire qu’il occupe à droite. Un second
personnage, Willie, est plutôt d’avis que « [ç]a ne veut rien dire, penser
contre la pensée unique », car, précise-t-il, « [l]e problème, avec
l’esprit de l’époque, […] c’est que tu peux pas juste toujours penser que t’as
raison, […] parce que t’es convaincu que tu penses contre ton époque, contre la
majorité – parce que bon, t’es jamais, jamais sûr, en fait, de repérer ce que
c’est ton époque, où c’est ? » [13] Il en conclut qu’il importe moins
de chercher désespérément à faire contrepoids à l’esprit de l’époque que d’« être
fidèle » à ses convictions profondes, qu’elles soient conformes ou pas à
ce qu’on juge être, pour une raison ou une autre, le reflet de cette époque.
À l’aune de cette réflexion de
Willie qu’on devine être à peu près celle de Tristan Garcia lui-même (le
narrateur dit « Merci Will »), il semble que deux objections
principales puissent être adressées à ceux qui estiment que l’axe majoritaire/minoritaire
doit prévaloir en philosophie. D’une part, en s’assignant la tâche de
« lutter contre la pensée unique », ils tendent à perdre de vue les
exigences du monde même et à faire de la politique une simple joute de
positionnement stratégique. Au lieu d’adopter une pratique qui réponde aux
exigences concrètes des acteurs sociaux, c’est-à-dire aux besoins réels qui
s’imposent de manière objective, ils prétendent diagnostiquer l’air du temps et
cherchent à tout prix à le renverser, se targuant d’être en constant porte-à-faux
avec leur époque. La théorie des minorités semble en effet avoir pour
conséquence absurde de nous inviter à cibler un lieu commun et à tâcher de le
renverser uniquement parce qu’il s’agit d’un lieu commun. À l’encontre de cette
théorie, n’est-il pas plus louable de se pencher sur des problèmes politiques
et ontologiques précis et de produire le discours le plus argumenté possible au
moment de prendre position – que ce discours soit original ou pas, inédit ou
connu ? N’est-il pas préférable de répéter une vérité commune plutôt que
de prendre plaisir à défendre pour la première fois quelque absurdité ? Deleuze
pourrait répondre qu’il ne prête pas le flanc à cette objection. Car, bien
qu’il ne soit pas le chantre de la communication et appelle en quelque sorte à combattre
la pensée unique, le consensus, le repli dans l’unité, ce n’est pas par
positionnement stratégique ni par insouciance à l’égard du réel lui-même qu’il
nous invite à mener ce combat. Son système philosophique repose sur les notions
de devenir et de multiplicité (c’est-à-dire le réel en soi selon lui et Bergson
[14]), qu’il cherche à respecter par un appel au bris de la communication. Il
n’en demeure pas moins que tous ceux qui ne croient pas, au contraire de Deleuze
et de Bergson, que le réel en soi correspond à la multiplicité et au devenir
sont susceptibles de sombrer dans un jeu de positionnement stratégique
lorsqu’ils visent à gagner le camp des minorités par simple esprit de
contradiction – ce qui est plutôt le cas de Leibowitz.
D’autre part, parce que l’on ne dispose
d’aucun détecteur de l’air du temps
et qu’on ne peut établir avec certitude et exactitude à quoi correspond le camp
dominant d’une époque, les philosophes qui ne jurent que par l’exercice de
minoration paraissent proposer, par leur théorie des minorités, de mener un
combat pour le moins abstrait où l’on ne peut déterminer à qui ou à quoi s’en
prendre dans les faits. Le problème devient alors le suivant : alors que les
défenseurs de la minorité prétendent forger une pensée capable de nous libérer
de toute forme d’hégémonie, de pouvoir, de prépondérance, cette pensée demeure
elle-même susceptible, à raison ou à tort, comme le suggère du moins Schmuel
Trigano, d’être associée tôt ou tard à une nouvelle forme de pouvoir, avec son
propre cadre de référence, ses attentes, ses réquisits [15]. La difficulté à
cerner avec précision l’air du temps actuel paraît d’autant plus grande que
certains philosophes et historiens qualifient notre époque de pluraliste. À ce
titre, par exemple, se penchant sur le phénomène religieux, Charles Taylor
s’oppose aux théories dites « soustractives » et affirme que
l’Occident n’a pas soustrait la religion de son espace au point de l’interdire,
mais qu’il a diversifié et multiplié les possibilités de vie envisageables (il
y a des athées, des agnostiques, des croyants, des religieux à la carte…),
faisant de la religion une simple option parmi d’autres [16].
Une position
nuancée
Serait-ce à dire que Tristan
Garcia nous invite à faire l’économie de tout langage qui oppose le minoritaire
au majoritaire ? En mettant en scène des personnages dont les dialogues
témoignent de certaines impasses liées à l’axe majoritaire/minoritaire, nous
demanderait-il de rompre à jamais avec cet axe ? Rien n’est moins sûr. Lorsqu’on
consulte certains de ses écrits, on constate qu’il est lui-même préoccupé par
moments de dégager différentes idées ou pratiques communes et de s’en détacher.
C’était le cas entre autres dans sa présentation de La meilleure part des hommes, « conte moral » qu’il avait
soin de distinguer du genre de « l’autofiction » qui, dans un passé encore
récent, avait la cote en France et ailleurs. Ce sera également le cas plus tard
lorsque, à l’occasion d’une conférence, il cherchera à « ne pas retomber
dans les ornières » [17] des œuvres d’art sans fin qui sont
caractéristiques de l’époque contemporaine, dont l’aversion pour la notion de
présence est bien connue. Ce sera le cas aussi dans sa thèse doctorale où il
abordera de façon critique un lieu commun du XXe siècle,
celui selon lequel l’art n’est pas une représentation
mais plutôt une présentation. Enfin,
et ce n’est là qu’un exemple de plus, ce sera par ailleurs le cas lorsqu’il
défendra son ontologie plate en la reliant à la perspective spéculative
contemporaine.
En effet, dans ce qui constitue
jusqu’ici son maître ouvrage de philosophie, Forme et objet, Tristan Garcia fait en partie valoir sa position en
soulignant qu’elle se distingue d’une tendance répandue de nos jours :
« l’époque nous semble incliner vers des métaphysiques de l’accès, que le
XXe siècle – auquel cet ouvrage propose en quelque manière de dieu
adieu – a été une période de théorisation des modes d’accès aux choses plutôt
que des choses : langage formel ou langage ordinaire ; phénoménologie
de la conscience, de la perception ; ouverture à l’être ; structures
de l’inconscient, structures des mythes ; normativité et procès de
subjectivation ; autoréflexion et conscience critique… Et il fallait bien
que le balancier bascule de l’autre côté. » [18] Mentionnons que ce
souci de distance critique vis-à-vis de l’époque apparaît aussi chez les autres
principaux penseurs spéculatifs, comme par exemple Quentin Meillassoux qui s’en
prend au « corrélationisme », position « centrale de la philosophie
moderne depuis Kant » [19], et Graham Harman qui, pour défendre le
caractère novateur de son « ontologie-orientée-vers-l’objet »,
affirme que « c’est une opinion étrangement prédominante chez les
philosophes modernes que les maisons, les montagnes, les rivières, en un mot
tous les objets sensibles, n’ont aucune existence naturelle ou réelle,
distincte du fait qu’ils sont perçus par l’entendement. » [20]
On peut en déduire qu’il n’est ni
tout à fait impossible ni tout à fait inutile selon Tristan Garcia et les
autres penseurs spéculatifs de s’adonner par moments à une peinture de l’époque.
Non pas que l’objectif de Garcia soit de prendre le contrepied de lieux communs
simplement parce qu’il s’agit de lieux communs ; mais il lui arrive à lui aussi,
en bon esprit critique moderne, de s’autoriser à mettre en lumière des idées
répandues pour mieux faire ressortir la valeur de ses positions. Encore une
fois, je souligne que je ne cherche pas à révéler ici une contradiction dans
l’œuvre de Garcia en montrant qu’elle oscille entre une mise en question de la
pertinence de l’axe majoritaire/minoritaire et une description doublée d’une
critique de certaines idées communes. Ce que je souhaite faire, plus
fondamentalement et d’une manière que j’espère apaisante, c’est signaler que l’œuvre de Tristan Garcia, à l’instar
du projet défendu dans « Critique et rémission » où il cherchait à
réconcilier plusieurs idées, tend à rechercher un équilibre réfléchi entre l’exigence occasionnelle de dépeindre puis
critiquer son époque et celle de penser en dehors de l’axe majoritaire/minoritaire.
Ainsi, dans Forme et objet, après
avoir dépeint le contexte actuel de la philosophie comme étant centré sur les
métaphysiques de l’accès puis fait valoir l’originalité de sa position d’un
point de vue historique, Tristan Garcia s’empresse d’ajouter d’autres raisons
(non relatives à l’époque) d’adopter la perspective spéculative qu’il adopte. Dans
La meilleure part des hommes, après
avoir créé un dialogue où se révèlent les problèmes liés au discours des
minorités stratégiques, il éclaire et excuse en une très belle conclusion les
travers de ses personnages en soulignant qu’ils sont, au fond d’eux-mêmes,
infiniment plus que ce qu’ils paraissent être en public. La dimension inclusive
et rémissive de la pensée de Tristan Garcia se prépare donc tôt dans son œuvre.
Il faut signaler du reste à quel
point les commentateurs qui saluent sa capacité à écrire des « romans
générationnels » occultent un pan pourtant essentiel de sa pensée. Car en plus
d’exceller à représenter certaines ambiances circonstancielles, comme c’est
directement le cas dans La meilleure part
des hommes et dans Faber. Le
destructeur, et indirectement dans Les
cordelettes de Browser, qui en dit long sur l’épuisement moderne, Tristan
Garcia porte quelquefois un regard critique sur l’idée même de génération, de
monde ambiant, d’époque. Et ces deux gestes philosophiques ne le conduisent
nullement à se contredire. D’une part, dans « Critique et rémission »
et le dialogue précité de La meilleure
part des hommes, Garcia fait comprendre combien il peut être malaisé et
intéressé d’essayer de capter l’air du temps dans l’intention simple de s’y
opposer. C’est une manière de souligner que la quête de minoration n’est ni une
condition nécessaire ni une condition suffisante d’un geste philosophique. Il
arrive en effet qu’il soit à peu près impossible de déterminer si une position
est majoritaire ou minoritaire, ce qui n’empêche pas d’essayer de sonder sa
pertinence philosophique. Aussi n’est-ce pas simplement parce qu’on juge qu’une
idée est répandue qu’il faut s’efforcer d’en prendre aussitôt le contrepied ;
autrement, toute proposition proférée en public à un moment donné se
condamnerait à devenir bientôt caduque du simple fait qu’elle a été proférée,
défendue, endossée par certains. D’autre part, et en contrepartie, Tristan
Garcia semble suggérer que la difficulté à capter l’air du temps ne nous
empêche pas d’essayer, du moins dans certains contextes, d’identifier diverses
tendances particulièrement prégnantes – identification qui assure du reste la
possibilité pour une singularité de se détacher d’autres singularités. Il est
d’ailleurs possible de considérer ces tendances non pas comme des idées dominantes et représentatives de toute
une époque, mais comme des idées
répandues parmi d’autres, et avec lesquelles il faut apprendre à négocier. C’est
qu’on peut toujours se demander, comme Garcia le fait à juste titre dans
« Critique et rémission », si les penseurs qu’on évoque comme des repoussoirs
« suffi[sent] [vraiment] à incarner un siècle plein et entier ».
(p. 259) Sans s’autoriser à relever l’existence de certaines idées
répandues, ne serait-ce qu’avec une inexactitude patente, on aurait peine à
cibler les idées importantes susceptibles de devoir être contredites, ou
écartées, ou nuancées ; on réduirait à néant la possibilité de l’esprit
critique et s’interdirait de laisser libre cours à l’envie qui prend lorsque,
lassé par une idée ou une pratique répétées, on est subitement tenté de passer
à autre chose. Tristan Garcia semble donc demeurer attaché d’une certaine façon
à cet esprit critique et à ce désir de passer sans cesse à autre chose, bien
qu’il lui préfère de plus en plus explicitement, à mesure que se développe son
œuvre – et là s’exprime aussi en partie son désir d’innover –, un esprit
inclusif de rémission qui s’articule à une ontologie plate et nuance la
pertinence de l’axe majoritaire/minoritaire.
Qu’il
présente sa propre pensée comme une métaphysique orientée vers l’objet ne doit
d’ailleurs pas nous induire en erreur : s’il insiste plus volontiers sur
les objets extramentaux, ce n’est pas pour se détourner à jamais de la relation
sujet/objet, mais pour réhabiliter ce que l’époque lui semble avoir mis de côté,
puis pour éviter de proposer « une pensée de notre pensée des
choses » qui en vient toujours selon lui à « éclipser les
choses » [21]. Les objets auxquels il s’intéresse ne sont pas uniquement
les objets extramentaux que Graham Harman associe au domaine des relations
interobjectales. Partisan d’une « ontologie libérale » (p. 278), Tristan
Garcia s’intéresse plus aux « choses
réelles » qu’aux « choses réelles »
[22] et, délaissant l’injonction d’oubli de Nietzsche, il veut rendre justice à
tout : les tables, les cercles carrés, Platon, l’intentionnalité, le film Léolo, la musique techno de Détroit,
Facebook, la passion contemporaine de l’extrême, les relations sujet/objet, les
relations objet/objet... Son ambition n’est ni de fonder une Theory of Everything qui expliquerait l’ensemble
des phénomènes en les reliant entre eux, ni de reléguer certains objets dans la
sphère poétique de l’indicible, ni encore d’asseoir son projet sur une base
hégélienne, ce qui tendrait à enfermer le monde dans l’horizon de la
conscience. Il veut orienter son esprit et le nôtre sur tout ce qui existe pour
signifier que seule une ontologie complète est une véritable ontologie. Pour
atteindre ses objectifs, il doit faire preuve à l’occasion d’esprit critique,
mais aussi et surtout de beaucoup de rémission. C’est en tout cas ce qui
ressort de plusieurs moments de son œuvre qui est certes encore très jeune,
mais bien mature et immensément riche. Déforme-t-on sa pensée en la décrivant
sous ces traits ? Libre à Tristan Garcia de le confirmer ou de l’infirmer. Mais,
parce que cette description peut d’ores et déjà recevoir le statut de « chose »,
son ontologie n’aura peut-être d’autre choix que de l’accueillir. J’espère
recevoir, pour cette raison, sa rémission.
Pierre-Alexandre Fradet
Notes :
[1] À ce propos,
on peut se reporter entre autres à cette conférence disponible en
ligne : https://sites.google.com/site/logiquecategorique/autres-seminaires/ontologie-plate/nimporte-quoi-est-quelque-chose-par-tristan-garcia-6-mars-2014
(consulté le 30 mars 2015). Notons que les numéros de page inscrits dans le
corps du texte sont ceux de la postface de Tristan Garcia, c’est-à-dire
« Critique et rémission », in Mehdi Belhaj Kacem, Algèbre de la tragédie, Paris, Léo
Scheer, 2014.
[2] Tristan Garcia, Forme et objet.
Un traité des choses, Paris, PUF, 2011, p. 18.
[3] Ibid., p. 18.
[4] Ibid., p. 12.
[5] Gilles Deleuze, « Lettre-préface à Jean-Clet Martin », in
Deux régimes de fous. Textes et
entretiens 1975-1995, édition de D. Lapoujade, Paris, Minuit, 2003, p. 338.
[6] Gilles Deleuze et Félix Guattari, Mille Plateaux, Paris, Minuit, 1980, p. 586.
[7] Gilles
Deleuze et Félix Guattari, Kafka. Pour
une littérature mineure, Paris, Minuit, 1975, p. 29.
[8] Anne
Sauvagnargues, Deleuze et l’art,
Paris, PUF, 2006, p. 139.
[9] Gilles
Deleuze et Félix Guattari, Kafka. Pour
une littérature mineure, op. cit.,
p. 33. Voir aussi Mireille Buydens, Sahara.
L’esthétique de Gilles Deleuze, Paris, Vrin, 1990 ; Jean-Claude
Dumoncel, « Discours indirect libre et politique du bégaiement. La
clinique du style selon Gilles Deleuze », in Adnen Jdey (dir.), Les styles de Deleuze. Esthétique et
philosophie, Bruxelles, Les Impressions Nouvelles, 2011.
[10] Gilles
Deleuze, Cinéma 2. L’image-temps,
Paris, Minuit, 1985, p. 200.
[11] Tristan
Garcia, La meilleure part des hommes,
Paris, Gallimard, 2008, p. 128.
[12] Ibid., p. 130.
[13] Ibid., p. 132.
[14] Sur le sujet,
voir notamment Gilles Deleuze, « Jean Hyppolite, Logique et existence », in L’Île
déserte. Textes et entretiens 1953-1974, édition de D. Lapoujade, Paris,
Minuit, 2002 ; Gilles Deleuze, « Bergson, 1859-1941 », in L’Île déserte. Textes et entretiens 1953-1974,
édition de D. Lapoujade, Paris, Minuit, 2002 ; Gilles Deleuze, « La
conception de la différence chez Bergson », in L’Île déserte. Textes et entretiens 1953-1974, édition de
D. Lapoujade, Paris, Minuit, 2002 ; Gilles Deleuze, Différence et répétition, Paris, PUF,
2005. Sur l’intuition et la chose en soi chez Bergson, voir par ailleurs
Pierre-Alexandre Fradet, Derrida-Bergson.
Sur l’immédiateté, Paris, Hermann, 2014.
[15] Schmuel
Trigano, La nouvelle idéologie dominante.
Le post-modernisme, Paris, Hermann, 2012.
[16] Charles
Taylor, L’Âge séculier, trad. de P.
Savidan, Montréal, Boréal, 2011. Voir également Jean Grondin, « Charles
Taylor a-t-il des raisons de croire à proposer ? Grandeur et limites d’une
justification de l’option métaphysique de la croyance par des enjeux
éthiques », Science et Esprit,
vol. 64, 2012, p. 245-262.
[17] Tristan
Garcia, « Pour en finir avec la fin de l’art et les œuvres d’art sans
fin », en ligne : http://www.diffusion.ens.fr/index.php?res=conf&idconf=2618
(consulté le 30 mars 2015).
[18] Tristan
Garcia, Forme et objet. Un traité des
choses, op. cit., p. 9-10.
[19] Quentin
Meillassoux, Après la finitude. Essai sur
la nécessité de la contingence, Paris, Seuil, 2006, p. 18.
[20] Graham
Harman, L’objet quadruple. Une
métaphysique des choses après Heidegger, trad. de O. Dubouclez, Paris,
PUF, 2010, p. 79.
[21] Tristan Garcia, Forme et objet.
Un traité des choses, op. cit.,
p. 8.
[22] Ibid., p. 10.

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